John Edgar Wideman, Écrire pour sauver une vie, le dossier Till

John  Edgar Wideman est un écrivain noir américain. Il a publié de nombreux romans ou récits dont la complexité, la poésie et l’opacité tragique sont les caractéristiques. Cet auteur n’a cessé d’être aux prises avec une matière autobiographique et sociale atroce dont il tente de dénouer le piège : son frère croupit en prison, et son fils, assassin schizophrène de son camarade de chambrée également. De quoi désespérer et se demander pourquoi, lui, professeur d’université et écrivain célèbre a été épargné et s’interroger sur sa propre culpabilité, le fait qu’il n’ait pas pu ou su éviter le pire : « Suis-je le gardien de mon frère ? », écrivait-il, traduction de Brothers and Keepers.

Il publie aujourd’hui un récit intitulé Écrire pour sauver une vie, le dossier Till, qui raconte l’histoire d’un certain Emmett Till, jeune homme qui s’est fait assassiner, en 1955, par des blancs racistes, dans le Mississipi où il était venu rendre visite à sa famille. Il avait, semble-t-il baratiné une femme blanche. Mais très vite, l’enquête s’oriente vers le père de ce garçon, Louis Till, dont le passé peu glorieux est devenu central dans le procès : il a été exécuté par l’armée, en 1945, pour avoir violé des Italiennes au moment du débarquement allié. Tel père tel fils conclut le tribunal, et l’affaire est pliée. Wideman de tenter, par conséquent, de remonter/démonter cette affaire, ce drame et cette sorte de malédiction qui se sont effectivement passés de père en fils, qui n’en finissent pas, de père en fils de s’abattre sur les frères noirs de l’auteur. Fatherlong, avait écrit autrefois Wideman, reprenant sempiternellement, comme Sisyphe, le rocher des souffrances noires, d’une génération à l’autre, d’un père absent ou destitué, depuis la traite et l’esclavage, jusqu’aux ghettos noirs et à leur violence autodestructrice qui ne fait que continuer la violence raciste et ségrégationniste des Etats-Unis.

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Dominique Chancé