décès de Simone Blajan-Marcus

Dècès de Simone Blajan-Marcus

sa foi en l’âme humaine était immense, son humour irrésistible, sa force de vie admirable,
Simone Marcus,
Docteur en médecine, psychanalyste,
A tiré sa révérence paisiblement, un soir d'été, le 12 juillet 2012,dans sa 101e année

In memoriam.

« Je me fie aisément à la foi d’autrui », avait-elle écrit, citant les essais de Montaigne dans son livre : « De mémoire de psychanalyste ».

Simone Marcus (Blajan Marcus) nous a quittés cet été dans sa 101e année.
Née en septembre 1911, elle a traversé le XXe siècle et ses désastres, comme témoin exceptionnel : Sa force vitale, son intelligence en éveil, son humour, et sa sensibilité bienveillante étaient sans cesse au service d’une profonde humanité.
Simplement animée par la décence commune, elle se consacrait depuis quelque temps à la transmission, recevant tout un chacun dans sa grande maison des bords de Seine, à Héricy. Elle citait avec bonhomie de nombreuses anecdotes sur sa vie professionnelle et personnelle, malgré, disait-elle : « Ma mémoire d’éléphant amnésique ». Portée par la passion du verbe, elle évoquait aussi bien son enfance entre des parents médecins d’origine russe, que ses débuts professionnels avant la guerre, la résistance ensuite, et la libération de Paris, ses rencontres avec Lacan, Françoise Dolto ou Maud Mannoni. Elle faisait aussi revivre de grandes figures du siècle comme celles de Moreno ou de Marie Bonaparte qu’elle avait personnellement connues.

Mais ce qu’elle aimait évoquer par-dessus tout, c’était la création, innovante à cette époque, de la SEPPT (Société d’Etudes du Psychodrame Pratique et Théorique), dans la mouvance lacanienne, avec Paul et Eugénie Lemoine Luccioni.
Son expérience concrète d’accueil de la misère psychique témoignait d’une distance éthique rigoureuse, dans la reconnaissance de la valeur humaine de la folie.

Ses engagements humanitaires, elle les soutenait encore et toujours au printemps dernier, malgré son âge, grâce à son exceptionnelle capacité d’adaptation à l’outil informatique.

A propos de François Tosquelles et la décence ordinaire, elle avait montré un réel intérêt pour le déroulement et la réussite d’une journée consacrée à « cet innovateur de haute qualité ». Elle avait promis d’envoyer un petit texte pour parler de sa rencontre avec lui, et prit le soin de l’écrire rapidement, comme une urgence, pour tenir promesse, avant de s’éteindre, paisiblement, peu de temps après.

C’est ainsi qu’elle concluait : « Sa disparition nous a tous peinés, mais son travail de démolition des idées reçues a continué chez certains de ses collègues », nous léguant sa foi en la liberté du parlêtre.

Au cours d’une longue conversation, fin mai, elle nous avait dit : «Je n’ai pas peur de mourir mais j’ai peur de me perdre ».
Devant notre perplexité, elle ajouta, avec un humour malicieux : « Oui, j’ai peur de me perdre parce que je m’aime bien ».

C’est une grande dame libre, une grande dame engagée dans les luttes de son siècle qui s’est perdue.
Reste sa parole qui se fie désormais à notre foi…

G.A. Rousseau

G.A Rousseau