Pensée du neutre et théorie du genre
Le sexe des modernes. Pensée du neutre et théorie du genre

Fiction & Cie

 

LE    SEXE   DES    MODERNE

Disjoindre le sexe et le genre est un geste éminemment moderne, théoriser cette dissociation l'est plus encore.

Ce livre est d'une certaine manière l'histoire de ce geste. Il nous mène des grandes entreprises déconstructrices de la Modernité des années 1960-1980 jusqu'au triomphe contemporain de la théorie du genre : de Sartre, Lacan, Deleuze, Barthes, Derrida ou Foucault jusqu'à Judith Butler.

Pourtant, parce qu'il s'agit d'un objet aussi fuyant que précieux, le sexe des Modernes est aussi un révélateur. Loin d'être tout à fait commun aux deux espaces intellectuels que sont l'Eutope et les Etats-Unis, il est peut-être témoin de leurs divisions : disputes, équivoques, héritages détournés, et guerres silencieuses ou avouées...

Il s'agit ici non seulement d'éclairer des doctrines récentes que la confusion des temps travaille à obscurcir, mais d'explorer ce qui s'est déplacé au tournant des xxe et xxie siècles entre le continent européen et le continent américain. Transmission ou au contraire fracture ?

Car le moment est venu d'interroger le partage du sexe et du genre sous l'angle de son histoire puisque cette histoire est la nôtre, et sans doute plus que jamais.

 

4509

 

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Couverture : «Self Portrait in Drag » d'Andv Warhol

© The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc.

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CNL 25€

 

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Éric Marty

Le sexe des Modernes. Pensée du Neutre et théorie du genre.

Fiction & Cie. Seuil 505 pages 25 euros.

 

Il y a de cela plusieurs années, (c’était au siècle précédent !) ,  me trouvant en vacances quelque part en Amérique Centrale, une collègue rencontrée qui enseignait à l’Université me demanda incidemment si en France nous avions à nous confronter avec les tenants de la théorie du genre. Elle me raconta les difficultés qu’elle-même devait affronter au sein de son département face à des militants particulièrement actifs et n’hésitant pas à perturber ses cours. Comme je n’avais aucune idée de ce dont elle faisait état, je me contentais alors d’écouter sans rien ajouter. Ce que j’ignorais alors c’est que si elle s’adressait à moi, un collègue venu de France, c’est que pour elle, et avec raison, tout ce mouvement s’appuyait via quelques auteurs nord-américains dont notamment Judith Butler et Gayle Rubin, sur des philosophes et des penseurs français, et pour ce qui me concernait directement sur les travaux de Lacan et sur d’autres auteurs avec lesquels il se trouvait plus ou moins directement en débat.

 

Plus tard, avec un certain étonnement mais avec curiosité, je recevais les premières publications de la collection initiée par Jean Allouch « Les grands classiques de l’érotologie moderne » dont à première vue je ne distinguais pas tellement le lien avec la psychanalyse. On ne doit pas, dit-on, faire état de ses faiblesses, mais pour qui a vécu les trente dernières années du siècle le déferlement des publications fut tel que je ne crois pas qu’il était envisageable humainement d’en prendre connaissance dans son ensemble et encore moins d’en dégager une forme de synthèse et par conséquent encore moins de se faire une opinion fondée en raison. Les lectures se chevauchaient, se répondaient sans se répondre et je mets au défi qui conque de soutenir que pour lui ou elle ce fut possible d’autant que le contenu d’auteurs tels Lacan, Foucault, Derrida, Barthes, Deleuze et quelques autres du même acabit n’étaient pas bien entendu d’une lecture aisée.

 

Ajoutons enfin que ces mêmes auteurs, comme d’ailleurs c’est naturellement le cas pour tout chercheur, variaient dans leurs écrits, se contredisaient ou restaient dans un flou difficile à mettre au clair.

Le temps a passé et le déferlement des questions autour du genre et des Trans nous arrive cette fois avec un lot impressionnant de questions sans qu’il soit possible de ne pas tenter sinon d’y répondre au moins de se positionner face à celles-ci de façon un peu réfléchie. Les médias s’en font un écho insistant tandis que les premiers adolescents commencent à en parler dans nos consultations.

 

C’est pour toutes ces raisons que je suis reconnaissant à Éric Marty de nous fournir enfin un travail qui permet à tout un chacun de revenir sur ce qu’outre atlantique les militants Trans, LGBT +  etc. nomment la French theory et qui s’appuie le plus souvent en la détournant sur les auteurs précédemment cités.

 

On comprend aisément que pour ainsi parcourir ce corpus théorique et d’en donner une vision compréhensible, les quelque 500 pages de l’ouvrage ne sont pas de trop ; Cependant cela ne doit pas rebuter le lecteur potentiel, car le style en est fluide et on suit sans difficulté majeure les méandres des oppositions théoriques qui s’y déploient tout autant que les diverses manipulations auxquelles leurs avancées ont pu faire l’objet. On ne se risquera évidemment pas ici à tenter d’en faire un résumé. Ce qui d’une façon plus subjective est à mon avis le plus frappant c’est d’une part le fossé qui sépare le milieu culturel français de son équivalent nord-américain. C’est aussi, qu’à force de vouloir dénoncer le sexe biologique au profit d’un genre construit, les militants dont l’activisme est remarquable et bruyant finissent tôt ou tard par valoriser précisément ce qu’ils sont supposés vouloir abolir.

 

En un mot un livre passionnant et indispensable à qui veut comprendre ce qui va inévitablement alimenter les débats dans les mois et les années qui viennent et qui concerne directement les psychanalystes dans leur pratique présente et future.

 

 

Laurent Le Vaguerèse

Une interview d'Éric Marty par marc Weitzmann dans le cadre de l'émission "Signes des temps" au sujet de ce livre "Le sexe des modernes"

https://www.franceculture.fr/emissions/signes-des-temps/gender-studies-une-enquete-philosophique-sur-lorigine-du-genre-et-ses-consequences-aujourdhui