Roland Gori est professeur émerite de psychopathologie clinique à l'université d'Aix-Marseille et psychanalyste. Il a été en 2009 l'initiateur de L'Appel des appels. Il a récemment publié Logique des passions (2002), La Santé totalitaire (avec M.-J. Del Volgo, 2005), Exilés de l'intime (avec M.-J. Del Volgo, 2008), La Preuve par la parole (2008), L'Appel des appels. Pour une insurrection des consciences (avec B. Cassin et Ch. Laval, 2009), De quoi la psychanalyse est-elle le nom ? Démocratie et subjectivité (2010), La folie évaluation (avec A. Abelhauser et M.-J. Sauret.2011).

La dignité de penser

Au nom d'un « rationalisme économique morbide » une
nouvelle colonisation des esprits envahit la planète. Avec ses
agences d'évaluation et ses hommes de main, cette « religion
du marché » interdit de penser le monde, notre monde,
autrement que comme un stock de marchandises ou de
produits financiers.

Pour réaliser cette nouvelle manière de civiliser les
mœurs il fallait faire chuter la valeur de l'expérience et celle
du récit - de la parole - qui la transmet. En faisant baisser
le cours de la parole au profit de l'information, de sa part
la plus technique et mesurable, nous perdons le monde
commun, nous perdons notre monde. Et plus encore en
Occident, nous nous habituons à lâcher la démocratie pour
l'ombre d'une technocratie qui organise insidieusement
nos servitudes volontaires.

Cet ouvrage invite au retour du politique pour retrouver
les conditions sociales et culturelles permettant de penser,
de juger et de décider. Cela exige que soit d'abord interrogé
le statut du savoir dans la culture, son rapport à l'expérience
et aux pratiques sociales. Mais comment retrouver aujourd'hui la dignité de penser dans une culture qui ignore la
légitimité du savoir du conte, du rêve, du jeu et de leurs récits ? La France qui se lève tôt a-t-elle encore le temps de
raconter sa vie, son histoire et ses rêves ?