Démocratie ?

 

Au moment où j’écris ces lignes, vient de se conclure en France un long processus qui a abouti après de nombreux passages des électeurs dans l’isoloir, à la nomination d’un Président de la République et des députés à l’Assemblée Nationale. Ce processus, qui est au cœur du fonctionnement démocratique du moins dans les démocraties représentatives, suscite chaque fois des commentaires qui en soulignent les insuffisances ainsi que les défauts. Il n’y a pas de système électif parfait c’est une chose certaine et chaque gouvernement assure qu’il réalisera des changements visant à améliorer la représentativité des élus. Cette fois, on regrette partout le taux records d’abstention, certains votes sont contestés, des voix s’élèvent pour déplorer la faiblesse des oppositions d’autres annoncent d’ores et déjà que la rue ne laissera pas au pouvoir la possibilité de faire n’importe quoi. Une chose pourtant fait l’unanimité dans ce concert. Ce sont les électeurs qui se déplacent qui décident qui sera élu. Aucune voix ne s’élève pour contester le droit à chacun de se prononcer comme il l’entend. Il ne viendrait à l’idée de personne aujourd’hui de refuser le vote de telle ou telle catégorie de citoyens ou de se plaindre du fait que tel candidat ai fait ou non une campagne pour demander aux électeurs de voter pour lui.

 

Tout ceci ne peut que nous inviter à la réflexion. S’agissant du « Prix œdipe des Libraires » que pouvons nous en tirer comme enseignements ?

Tout d’abord un principe fondamental mais qu’il faut souligner. Tous les auteurs présentés sont à égalité de chance et disposent au départ des mêmes opportunités de l’emporter. Certes, ils doivent subir une sélection préalable mais nous nous efforçons, tout comme les libraires, de les choisir les ouvrages en fonction non de l’appartenance des auteurs à telle ou telle association mais en fonction de la qualité de l’ouvrage que nous avons lu et dont nous avons proposé à tous la lecture critique.

 

Le vote électronique permet à ceux qui n’ont pas la possibilité de se déplacer dans l’une des librairies qui est associée au Prix de le faire. Dans les auteurs il y a ceux qui font campagne et ceux qui ne le font pas ; Il y a ceux qui sont soutenus largement par leur éditeur et ceux qui n’en reçoivent aucun soutien. Il y a ceux qui sont enseignants et invitent les étudiants à voter pour eux et ceux qui n’ont pas de fonction enseignante. Il y a ceux qui sont membre d’une association et ceux qui n’ont aucune appartenance associative. Il y a ceux qui sont soutenus par leur association et qui font le rappel pour que leur représentant soit l’heureux élu et ceux dont l association ignore superbement l’opportunité qui leur est offerte voire du fait de rivalités internes font tout pour faire échouer l’auteur en question. Il y a ceux qui disposent d’un réseau personnel et ceux qui n’en disposent pas. Il y a ceux qui font une campagne active et ceux qui attendent que le résultat les désigne pour le prix. Il y a ceux enfin qui ont une solide implantation locale et qui en quelque sorte brillent parce qu’ils sont les représentants d’une part vivante de la psychanalyse dans leur ville ou leur région. Alors, direz-vous, tous les auteurs ont-ils les mêmes chances de l’emporter ? sans doute pas, mais n’est-ce pas le propre d’une élection quelles qu’en soient les modalités ? pense-t-on que celui qui est membre d’un parti qui est fort de nombreux militants et représentants dans toute la France part à égalité avec celui qui ne dispose que de sa bourse et de sa volonté d’en découdre pour défendre les valeurs auxquelles il croit ?

Que tout ceci ne nous empêche cependant pas de réfléchir aux moyens de s’approcher le plus possible de cet objectif mais acceptons une fois pour toutes l’idée qu’il s’agit d’un idéal et que nous ne l’atteindrons certainement jamais. Certains en concluent un peu hâtivement qu’il faut renoncer à cette entreprise ? ce n’est pas mon point de vue car tout au long du processus nous mettons en avant certains livres, nous mobilisons les libraires, nous interviewons les auteurs montrant ainsi que la psychanalyse maintes fois enterrée n’est pas morte. Alors en définitive quel que soit celui ou celle qui reçoit le prix œdipe des libraires il le reçoit au nom de tous ceux qui ont contribué à son élection : ceux qui ont conçu le site, ceux qui participent au groupe de lecture, ceux qui envoient des critiques, les éditeurs, les libraires et enfin vous lecteurs du site œdipe et des ouvrages dont nous parlons, vous qui votez et nous aidez ainsi à pour suivre ce travail de diffusion et de réflexion.

Alors faisons ensemble en sorte que Vive le prix 2018.

Laurent Le Vaguerèse