En cette année 2013, le « Prix Oedipe des libraires » poursuit sa route. Alors qu’aujourd’hui se trouve volontiers dénigré tout ce qui n’est pas biologie et génétique –encore faut-il préciser qu’il s’agit le plus souvent d’une biologie et une génétique de comptoir- nous sommes plus que jamais attentifs aux écrits de ceux qui continuent à penser que dans l’écoute singulière de la parole d’un homme, d’une femme, d’un enfant quelque chose de la vérité, de l’incroyable, de l’inatendu peut surgir et que de cette parole, de la confrontation avec ceux qui auparavant ont écrit et pensé, une nouvelle compréhension de l’être humain, avec son incroyable complexité, peut soudain s’éclairer.

Chaque année, depuis 5 ans, nous essayons grâce au travail de lectures et de commentaires associé au « Prix Oedipe des libraires », de vous aider dans vos choix. Nous sommes aussi à l’écoute des livres que vous avez découverts. Il se peut que nous soyons injustes mais c’est un risque que nous assumons. En tout cas nous ne sommes pas et ne serons jamais complaisants ni avec les auteurs ni avec leurs écrits.

Vos libraires, dans des conditions de plus en plus difficiles, vous accueillent dans leurs librairies. Les conditions matérielles dans lesquelles ils travaillent, la pression des banques, les contraintes financières liées notamment à la crise, les conduisent parfois à ne plus pouvoir remplir leur rôle de conseil qui est au cœur même de leur métier et ce pourquoi ils aiment à l’exercer. Cette année a vu la fermeture de la libraire Lipsy, symbole pour toute une génération de la présence de la psychanalyse au cœur de la vie intellectuelle parisienne. Grâce à Françoise Carlier qui fût notre partenaire au début de l’aventure d’Oedipe, cet endroit minuscule (la librairie a plus tard déménagé et fût reprise dans un local plus grand par Bernard Debail) a constitué notre repaire durant des années. De nombreuses librairies à Paris comme en province sont menacées de fermeture et leur avenir est compromis. Nous en avons chaque jour des échos.

Cette tendance est dangereuse. Tout le secteur de l’édition dont la crise est manifeste, et dont les libraires ne sont qu’un maillon, doit d’urgence entamer une vaste réforme, mais pas n’importe laquelle. Parier sur la qualité du service rendu, la convivialité, la défense des ouvrages, maintenir les librairies dans leur rôle de centre de diffusion de la culture, telle est la voie qu’il faut suivre. Si dans l’avenir le libraire devait perdre son rôle de conseil, si les librairies devaient se transformer en dépôt pour les livres et les revues, et faire de plus en plus de place aux ouvrages de vulgarisation et au romans à l’eau de rose, ce serait à brève échéance la fin des librairies. C’est notamment pour aller contre cette pente fatale, que le prix associe étroitement les libraires à son déroulement.

Ce choix enfin est le vôtre. C’est celui dont témoigne vos courriers et dont l’élection est au bout du compte la conclusion logique. Plus vous nous aiderez au cours de l’année dans ces choix, plus ils seront pertinents. Si vous avez le sentiment que nous n’atteignons qu’imparfaitement le but que nous nous sommes fixés alors venez nous aider à y parvenir. Des groupes sont ouverts à Paris et en province. Vous pouvez y participer où plus directement nous adresser vos critiques et vos commentaires ;

L’an passé vous avez été plus de 1300 à voter soit par courrier soit dans les librairies. C’est incontestablement un encouragement pour toute l’équipe du prix, c’est aussi une responsabilité. Plus le prix est par vous reconnu, plus nous devons en préserver la qualité et l’impartialité. Nous n’avons pas d’argent à distribuer aux lauréats, ce que nous leur donnons c’est le témoignage de la confiance que vous nous accordez. Chaque année cette confiance s’accroit et la récompense des auteurs s’en trouve majorée. Nous tâcherons encore cette année d’en être dignes..