Les marques du singulier et de l'individuation chez Freud et Frege

Date de publication:

Organisateurs

Pierre Marie / Collège International de Philosophie

Adresse

École Normale Supérieure
salle des Résistants, 45 rue d'Ulm 75005 Paris
75005 Paris
France

Dates

Mercredi, novembre 14, 2018 - 21:15 - Mercredi, avril 10, 2019 - 21:15

acces:

Conditions

s'inscrire sur psychanalyseenextension@gmail.com

Déroulement

le 2ème mercredi du mois à 21h15

SÉMINAIRE
21h15-22h30 : Salle des Résistants, École Normale Supérieure, 45, rue d’Ulm, 75005-Paris 2ème mercredi du mois à compter du 10 octobre 2018

Pierre Marie
Les marques du singulier et de l’individuation chez Freud et Frege

Depuis Platon, Husserl le redit avec force, le singulier est la croix de la philosophie, et il est plutôt sage de n’en point parler. Aristote n’envisage qu’une logique des propositions universelles et particulières ; Hegel n’en fait qu’un moment du concept. Et lorsqu’on l’évoque, ainsi Kierkegaard et Nietzsche, c’est à une entité abstraite que l’on est renvoyé : l’unique qui choisit, l’homme qui peut promettre.
Or, d’emblée, Freud assigne à la méthode qu’il découvre, la psychanalyse, d’être celle du singulier, du cas. Et si théorie il y aura, la métapsychologie, Freud lui déniera toujours la capacité de dire la vérité du cas. Au demeurant, c’est toute la gageure de la technique –et donc de la formation des psychanalystes. Comment entendre le singulier ? Freud, préparé par Brentano qui ménage dans sa théorie du jugement une place au singulier et par Bolzano qui montre que le singulier ne relève pas du concept mais de l’intuition, en définit la condition par la règle de l’écoute également flottante qui seule offre l’opportunité de saisir dans la « parole » de celui qui parle les événements qui y surgissent, die Einfällen, et qui signent sa singularité.
À l’opposé des conceptions de l’individuation de la tradition, décrites en 3ème personne, Freud
montre que l’individuation s’exprime en 1ère personne.
Étonnement, la plupart des disciples de Freud ne se sont pas arrêtés sur cette attention au singulier quand bien même est-elle supposée par ceux qui se risquent sur un divan : c’est bien de moi dont il s’agit, de moi dans mon irréductible singularité ? N’entend-t-on pas sans cesse des affirmations qui font de la théorie la vérité du cas ? La théorie psychanalytique dit que, donc il suit que. Et voilà pourquoi, nous dit Sganarelle, votre fille est muette.
Ne cherchez pas plus loin à ce jeu du Médecin malgré lui l’opprobre désormais jeté sur la psychanalyse.
Or, à la même époque, Frege, pressé de rejeter le singulier -n’est il pas une scorie dans le jardin du logicien ?- lui accorde une attention centrale –c’est même la raison de son différend avec Husserl- que ses deux élèves, Wittgenstein et Austin, se dépêchent de faire fructifier comme leurs continuateurs Cavell, Travis et Benoist.
Ce n’est pas le moindre des paradoxes que le psychanalyste doive aujourd’hui chausser les lunettes des élèves de Frege pour lire ce que Freud écrit, cette voix qui parle en moi, Claim écrit Cavell (mot venu de l’ancien français « claim » qui signifiait plainte), que j’adresse à l’Autre incarné par le psychanalyste. Car que le singulier ne relève pas du concept ne l’empêche nullement d’être entendu : ce que Freud propose avec sa règle.
N’est-il pas temps alors, pour paraphraser Cavell, de « dépsychologiser la psychanalyse », de l’arracher de la métaphysique où la « soif de généralité » des psychanalystes l’a renvoyée ?
Ce séminaire est donc une invitation à ce que Peirce appelait l’expérientiel, terme que Freud n’aurait pas renié : l’événement venu de l’Autre qui nous constitue dans l’après-coup comme sujet à partir de la trace qui en subsiste.

Pour s’inscrire : adresser un mail à psychanalyseenextension@gmail.com avec nom, prénom, adresse mail, téléphone ; la liste des participants devant être déposée pour des raisons administratives.