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Pervers Analyse d'un concept/suivi de Sade à Rome
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Voici deux essais sur le problème du Mal. Leur sécheresse conceptuelle, leur caractère argumentatif, sont de principe. Car ils sont tous deux animés d'une conviction forte : le Mal est une question philosophique qu'il faut ôter des mains des théologiens, des psychologues du crime et des critiques littéraires assoiffés de sublime. Faire le mal, et le plus de mal possible, obéit en effet à des règles rigoureuses, et il faut mettre ces règles au jour.
La voie suivie par le premier essai est analytique : quels sont nos critères quand nous utilisons le prédicat « pervers » ? Quelles contraintes logiques ce terme impose-t-il à nos énoncés, ordinaires, ou à prétention scientifique ? La thèse défendue ici est paradoxale. « Pervers » signifie uniquement « pire que mal ». Mais y a-t-il pire que mal ? N'est-ce pas une absurdité grammaticale ? En expliquant pourquoi ce n'est pas le cas, Pierre-Henri Castel combat deux idées communes : non, être pervers n'est pas soluble dans le relativisme culturel ou historique (on peut dire en quoi consiste ce concept moral) ; non, ensuite, il n'existe pas de disposition naturelle
Le second essai est une lecture critique de l'Histoire de Juliette, de Sade. Car si le Mal (pervers) est bien conceptualisable, alors on peut, et même on doit surmonter la forme « littéraire » de l'œuvre de Sade, et interroger son programme philosophique et éthique. Le Mal que visent les actes pervers ne saurait être un simple accident dans l'ordre des choses. Mais quelle sorte d'ontologie est susceptible de rendre le Mal absolu effectivement réel ? C'est à relever ce défi métaphysique que Sade s'est attelé, en parlant par la bouche du Pape Pie VI, le libertin ultime. Pour Pierre-Henri Castel, sa solution n'est pas sans mérite. Avec une conséquence capitale : Sade, ainsi compris, n'est plus une source de frissons délicieux pour amateurs d'humour noir et de second degré. Sa pensée est objectivement dangereuse. Elle ne parle pas juste du Mal ; elle le fraye.