"L'espèce humaine" au théâtre de l'Épée de bois Vincennes

l'espèce humaine

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L’ESPÈCE HUMAINE de Robert Antelme Adaptation et interprétation Anne Coutureau Mise en scène Patrice Le Cadre Création sonore Jean-Noël Yven Production Théâtre vivant Presse Lynda Mihoub

 

De sa captivité en 1945 en Allemagne, Robert Antelme a tiré un récit exceptionnel où il porte à sa dernière limite, la réflexion sur la volonté exterminatrice des SS : il met en lumière la logique de supériorité et le mépris sur lesquels se fondent, plus ou moins ouvertement, tous les systèmes d’exploitation et d’asservissement.

L’Espèce humaine est une œuvre unique, bouleversante, d’une élévation de pensée absolue et d’une actualité redoutable.

Du jeudi au samedi à 19h - dimanche à 14h30 durée : 1h20 jusqu'au 15 janvier

Théâtre de l’Épée de Bois - Cartoucherie de Vincennes https://www.epeedebois.com/

Billetterie : https://www.epeedebois.com/un-spectacle/lespece-humaine/

Renseignements : 01 48 08 39 74

Plus d’infos : http://theatrevivant.fr/lespece-humaine/ ________

La salle est maintenant silencieuse. Un homme s’avance et nous dit « pensez à éteindre vos portables ». Cette phrase je venais moi-même de la prononcer quelques instants auparavant. C’est là, sans doute, un trait d’union discret entre une séance d’analyse et le théâtre surtout lorsque, comme c’est le cas ici, seul sur scène, un acteur ou une actrice incarne une parole.

 

C’est que dans un cas comme dans l’autre c’est d’un dire dont il s’agit. On sait combien cela relève de l’impossible de la transmission. Ce qui a été vécu, éprouvé, que ce soit dans la vie quotidienne dans sa banalité, ou, comme c’est le cas ici par l’expérience des camps aux limites de ce que l’homme peut vivre, comment le dire.

 

Après avoir vécu un moment intense, un épisode particulier de sa vie, il se produit comme un moment d’hésitation qui traverse chacun de nous. Faut-il essayer de mettre des mots sur ce que l’on a pensé, senti ou n’est-il pas préférable d’y renoncer sachant la tentative assez vaine en somme ? Sachant aussi que d’autres, par leur bavardage, leurs mensonges, viendront troubler sa réception ?. C’est à ce point que l’écriture qu’elle soit théâtrale ou non rencontre l’expérience analytique.

 

L’analysant,  espère que le temps ne lui sera pas compté pour chercher les mots pour le dire. Que son propos ne sera pas embarrassé d’un retour qui viendrait nuire à ce qu’il tente de dire. L’analyste est payé pour écouter et d’abord se taire. C’est aussi la tâche du spectateur : écouter en silence.

 

Anne Coutureau reprend ici la parole de Robert Antelme comme en écho au texte porté, incarné, par Dominique Blanc, celui écrit par Maguerite Duras, « La douleur ». Dans ce dernier, Duras raconte l’attente insoutenable de son amant Robert Antelme dont elle ne sait s’il est mort ou vivant, alors que peu à peu ceux qui en reviennent commencent à parvenir à Paris. Comme Dominique Blanc est Marguerite Duras , Anne Coutureau, incarne Robert Antelme, s’empare de ses mots, dans un espace étrangement vide de tout décor, qu’elle parcourt dans tous les sens, le temps rythmé seulement par l’éclairage qui s’allume et puis s’éteint, palpitation du temps du jour et des saisons.

 

Robert Antelme a choisi d’écrire ce texte « L’espèce humaine » pour affirmer en somme que, loin d’avoir réussi, le système concentrationnaire n’avait fait que confirmer jusque dans sa volonté de séparer en deux l’humanité, que tous, SS et prisonniers des camps appartenaient bien à une seule « espèce », l’espèce humaine.

 

Il vous reste bien peu de temps pour aller voir ce spectacle, dont les mots résonnent étrangement en nous alors que l’on entend chaque jour, si près le bruit des bottes…

 

Laurent Le Vaguerèse

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